Formation en apprentissage : revoilà la préférence nationale
Le jeudi 27 janvier, la LDH (Ligue de Droits de l’ Homme) et la journaliste Marie Barbier ont révélé une information édifiante : Le ministère de l’Enseignement supérieur a créé en 2008 un site d’admission Post-Bac (APB) qui permet aux lycéens de terminale de se pré-inscrire sur l’internet dans des formations de l’enseignement supérieur.
Or cette année, à l’ouverture de ce serveur le 20 janvier, les lycéens de nationalité autre que française ont eu droit à de bien étranges étrennes. Après avoir suivi la procédure idoine et sélectionné une formation dans le cadre d’un apprentissage en IUT, ils virent apparaître sur leur écran le message suivant : « Seuls les candidats de nationalité française peuvent s’inscrire dans une formation en apprentissage sur APB ».
Des mots lourds de sens qui giflent notre éthique nous viennent immédiatement à l’esprit : préférence nationale, discrimination…
La réponse donnée par le ministère était confuse voire inquiétante, il s’agissait de lutter contre le travail des sans papiers, la formation en apprentissage nécessitant la possession d’un contrat de travail.
Confuse, car les lycéens ressortissants de la Communauté européenne, qui bénéficient pourtant de la Convention de Schengen, étaient eux aussi victimes de cette éviction.
Extrêmement inquiétante et préoccupante, car un ministère français refusait clairement une formation à des lycéens en fonction de leur nationalité.
Cela venait s’ajouter à un climat déjà très pesant où de nombreux jeunes majeurs scolarisés se trouvent régulièrement menacés ou tout simplement expulsés de France.
Le groupe Europe Ecologie-Les Verts du conseil Régional a vivement soutenu, le 30 septembre 2010, la résolution de la commission Lycée qui place désormais sous la protection de l’assemblée régionale les élèves étrangers susceptibles d’être expulsés de notre territoire, qu’ils soient mineurs ou majeurs. Il s’est donc logiquement insurgé contre cette politique inacceptable. L’exécutif régional a d’ailleurs vite réagi en demandant au ministère de lui communiquer « toutes les informations utiles permettant de mieux comprendre le fonctionnement de la procédure de pré-inscription des jeunes ainsi concernés et le cas échéant, les raisons d’un tel fonctionnement ».
Le ministère de l’Enseignement supérieur avait semblé, dans un premier temps, vouloir se raviser car, par une dépêche de l’AFP, on avait appris qu’un lycéen étranger pouvait finalement s’inscrire en formation en apprentissage, à condition de suivre une procédure spécifique en dehors de l’inscription sur APB.
Des indications avaient été ajoutées sur le site pour en informer les personnes concernées.
Cette nouvelle disposition conduisait toujours à une ségrégation des étudiants et ne nous satisfaisait pas davantage. Elle ne satisfaisait d’ailleurs ni la FCPE (Fédération des Conseils de Parents d’Elèves), ni l’UNEF ( l’Union Nationale des Etudiants de France), ni l’UNL (l’Union Nationale Lycéenne) qui ont réclamé une fin immédiate de toute discrimination. Ces trois associations ont annoncé le 31 janvier qu’elles saisiraient la HALDE sous 8 jours si la procédure n’était pas rectifiée.
Saine réaction qui a porté ses fruits. Dans la soirée du mercredi 9 février, une dépêche du Parisien et de l’AFP annonçait le renoncement de la ministre Valérie Pécresse ; désormais tous les lycéens et cela sans distinctions peuvent se pré-inscrire sur APB dans une formation en apprentissage. Nous restons tout de même vigilant ; d’autant plus qu’un problème demeure.
En effet, le ministère de l’Enseignement supérieur a créé une procédure informatique qui permet une reconnaissance automatique de la nationalité des personnes qui utilisent APB.
Selon la Ligue des Droits de l’Homme, cela ne peut être possible que grâce à un croisement de différents fichiers de données personnelles. En somme une pratique illégale.
Le gouvernement actuel affiche clairement une volonté de mener une véritable chasse aux personnes sans-papiers.
Ce qui est condamnable non seulement dans le principe, mais également dans la mise en œuvre de pratiques douteuses qui consistent à transformer les services de l’éducation en « indics » de la police.
David Mbanza
Conseiller municipal de Bois-Colombes
Conseiller régional Europe-Ecologie-Les Verts